Lorsque Desideria se réveilla, elle regarda autour d’elle. Elle se trouvait dans une chambre, vêtue d’une robe blanche. Elle essaya de se lever mais elle sentit une douleur au pied gauche. Elle enleva le drap et vit qu’elle avait une bande. Il reposait sur un coussin, la jeune femme ne pouvait pas vraiment bouger. Quelques minutes plus tard, un homme entra dans sa chambre, la porte était déjà ouverte.
« Oh vous êtes réveillée, c’est parfait. Je suis le médecin qui vous a soigné. Heureusement qu’Aiolia vous a trouvé, comment auriez-vous fait toute seule dans les montagnes avec un pied cassé ? (La demoiselle le regardait d’un air ahuri, puis elle se souvint de l’homme qui l’avait agressée.) Quel est votre nom Mademoiselle ?
— Desideria.
Elle n’était pas vraiment à l’aise dans ce lieu inconnu.
— Que vous est-il arrivé ? Vous aviez aussi un léger cran à la tête, d’où votre bandage.
Instinctivement elle posa la main sur l'emplacement. En effet elle sentit le tissu.
— J’ai fait une chute. Il y avait un homme, il m’a frappé au visage.
— Cela explique la marque sur votre joue droite et votre pied cassé. Bon, votre état est stable, il y a finalement eu plus de peur que de mal. Néanmoins, d'après ce qu'Aiolia m'a dit, la chute aurait pu être mortelle. Si vous étiez tombée directement sur la tête, vous ne seriez plus là. Pour le moment vous devez éviter d’appuyer sur votre pied. Je préconise au moins un mois de repos, si ce n’est pas plus. Comme vous ne pouvez pas vous déplacer ainsi, je vais demander au Grand Pope de venir vous voir.
— Qui est-ce ?
— C’est notre chef. Il viendra peut-être dans la journée s’il a le temps. L’infirmière vous apportera le traitement, suivez bien ses indications. Je vous souhaite un bon rétablissement Mademoiselle Desideria. »
Le médecin tira sa révérence, laissant la jeune femme seule dans sa chambre. Ce dernier se hâta de prévenir le Grand Pope que sa patiente était réveillée et en état de répondre à ses questions. Le docteur disposa ensuite lorsque le grand chef le lui permit. La patiente finissait de manger son petit-déjeuner : tartine avec confiture et jus d’orange. La dame de chambre revint prendre son plateau et repartit aussitôt alors que la patiente regardait par la fenêtre. Elle entendait des oiseaux chanter, le soleil brillait et elle pouvait voir quelques temples au loin. Toutefois elle s’ennuyait ferme dans cette chambre. Desideria aurait apprécié un peu de compagnie. Le temps passait lentement, très lentement… trop lentement même, et cela agaçait la jeune femme. Elle n’avait aucune idée de l’heure qu’il était. Puis elle entendit quelqu’un entrer, elle tourna la tête vers la personne et fut surprise. C’était un grand homme habillé d’une robe blanche avec des épaulières rouges à longs pics. Il portait un casque imposant carminé et un masque bleu dissimulait son visage. Il avait aussi de longs cheveux gris. Desideria fut impressionnée par cette apparition qui lui sembla étrange. « Tu pourrais au moins la saluer. Ça engagera la conversation et évite de lui faire peur si possible » pensa-t-il. À peine arrivé qu'il était déjà contrarié tandis qu'elle paraissait si timide.
« Bonjour Desideria.
— Bonjour. Vous êtes le Grand Pope ?
— Oui. J’aurais quelques questions à te poser. (Elle répondit par l’affirmative alors il débuta son interrogatoire.) D’abord dis-moi comment tu es arrivée au sanctuaire. « J’aurais formulé de manière plus sympathique. »
— Un homme me poursuivait. J’ai couru jusqu’ici en espérant le semer mais il était endurant. Il a su me rattraper. Je suis tombée d’une falaise puis j'ai atterri ici.
— Elle ne semble pas avoir compris ce que j’attendais d’elle, songea-t-il. Es-tu passé par un établissement quelconque ? Par où es-tu arrivée ?
— Je me souviens seulement avoir demandé asile dans une petite maison. Personne ne répondait. Alors dans la hâte, j’ai joué avec la poignée et la porte s’est ouverte. Apparemment c’était la maison d’un vieil homme. Il était à son potager, je suppose qu’il ne m’a pas entendu frapper. Quand j’ai filé dans sa cours arrière, il a crié quelque chose mais je n’ai pas compris. Je ne pensais qu’à échapper à mon ravisseur.
— Je vois, songea-t-il, elle a traversé par un passage dimensionnel. Je sais duquel il s’agit. On condamnera cet accès. Ce vieil homme ne nous est plus utile.
— Il faudra qu’on le reloge ailleurs, ajouta l’autre. Son ravisseur est peut-être encore dans les parages. Nous devons engager les recherches.
— En effet, nous ne pouvons pas prendre le risque qu’il divulgue l’existence du sanctuaire.
— Grand Pope ? Vous semblait ailleurs ?
Le chef accorda à nouveau son attention.
— Je réfléchissais. Peux-tu me décrire ton ravisseur ? Nous ne pouvons pas laisser son geste impuni. Il a franchi une terre sacrée.
Soudain elle fut inquiète.
— Il ne sera pas sacrifié ?
— Je ne pense pas qu’il t’aurait épargné s’il avait pu t’avoir vivante.
— Mais moi aussi j’ai franchi vos terres sacrées. Serais-je sacrifiée également ?
Il se mit à sourire, bien que sous son masque on ne pouvait le voir.
— Tu en as des idées dans la tête. Nous ne sommes pas un peuple aztèque. Ta vie seras épargnée mais tu devras rester au sanctuaire ; lui sera mis en prison pour agression envers une femme. Dis-moi, comment était-il ?
— Un grand homme aux cheveux bruns, courts et ondulés. Il portait une barbe. Musclé. Il avait un maillot bleu et un pantalon noir, si je me souviens bien. Je me rappelle qu’il avait une cicatrice à son œil droit. Une longue griffe qui s’étendait de haut en bas. Après… Je n’ai pas plus de détails. J’ai surtout cherché à le fuir.
Le Grand Pope se tourna vers la sortie.
— Je vais le faire rechercher, n’aie aucune crainte. Quand ton état te le permettra, tu pourras te promener au sanctuaire. Mais je t’interdis d’aller au Star Hill.
— Au Star Hill ?
— C’est un mont qui s’élance derrière la grande statue d’Athéna. C’est un lieu réservé aux Popes. Tu me promets de ne pas y aller ? Sinon, là tu risqueras ta vie.
— Entendu, je n’irai pas.
— Tu le promets ? insista-t-il d’un air méfiant.
— Oui c'est promis. »
Le Grand Pope la salua et sortit de la chambre. Desideria se trouva à nouveau seule. Il y avait une béquille en bois près de son lit. Elle tendit sa main afin de l’attraper. Elle voulu bouger son pied mais cela lui faisait trop mal. La balade ne sera pas pour aujourd’hui. Cette visite lui avait paru bizarre. Le Grand Pope était à la fois chaleureux et froid ; distant avec toutefois une envie de la protéger. Elle ne verra plus sa famille maintenant qu’elle est condamnée à séjourner au sanctuaire. Ses parents vont s’inquiéter, sa petite-sœur et son petit-frère aussi. Ils la croiront sûrement morte. Quelle douleur allaient-ils subir et elle également. À cette pensée, des larmes coulèrent sur les joues de la jeune femme.